Nouveau boîtier M

bardamu
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Phil, l'allusion de Pégé m'était destinée, je n'ai même pas cru bon de relever.
Invité
citation :
Les plus de 600 images du Flicker de cet invité m'ont laissé perplexe.


Oui, oui, il y matière à perplexité, la perplexité est une bonne réaction.

Certaines personnes ont vu mes images, rares les ont toutes vues, ça n’est pas humain (et encore sur Flickr il n’y a qu’une petite partie de ma production récente), seuls les regards un peu décalés s’en tirent pas mal, mon meilleur ami, qui me connait, a vu où je voulais en venir. Il y a deux choses, comment sont reçus mes images, qui là peut m’échapper un peu, et ce que moi je ressens quand je fais mes images, quand je sors faire images, j’ai tout d’abord un moment difficile, de tension je sens que je perturbe la réalité à la photographier, puis assez progressivement, après quelques images, en fait, je disparais, c’est à ça d’ailleurs que je vise dans mes images, à disparaitre, m’effacer, avoir un rapport vide au lieu, contemplatif, avec une certaines dose d’indifférence, au bout d’un moment je me sens mieux, en union avec le lieu, et je chasse, je traverse, reviens sur mes pas, je vois une chose, la cadre mentalement. Je cherche à disparaitre c’est pour cela que mes images sont souvent sans les artifices de ce qui peut faire ‘art’ en photo, je cadre toujours pareil, très souvent l’objet est abordé frontalement, j’aime la symétrie ou la sérialité des formes, l’objectif est toujours calé à peu près pareil (sauf quand je manque de recul, j’ouvre un peu l’angle du zoom). Avec une plus anicienne série que j’avais faite, un ami m’avait dit « Tes images, on dirait que personne ne les a prises », comme si elles s’étaient prises toutes seules, j’ai aimé cette remarque, je cherche ça en effet, j’ai expulsé de mon travail pour l’instant toute forme d’anecdote (l’anecdote est toujours un motif pour prendre une image, le truc ‘vu’ ou ‘bien vu’). J’aimerais que celui qui regarde mes images arrive à être aussi vide en lui que moi je suis vide quand je prends mes images, un vide agréable, je ne viole pas la réalité, je ne la mets pas en boite de manière violente (comme je trouve parfois certaines images que je peux voir), je ne la force pas à se plier à ce que je veux dire puisque ce que je veux dire c’est qu’il n’y a rien à dire, juste à voir. Je pense beaucoup à Frank Stella, un artiste qui m’a beaucoup marqué, qui disait « What you see is what you see ». Il disait aussi « Les gens pensent que mes peintures sont ennuyeuses à regarder, ils ne s’imaginent pas à quel point je m’ennuie à les faire ». Ce sont de très belles phrases, artistiquement très… comment dire elles ouvrent des horizons créatifs je trouve.
Mais je ne m’ennuie pas à faire mes images, car je me concentre sur des aspects proprement photographiques, je me revendique d’un certain « métier » (mon travail n’est pas conceptuel), en faisant mes images, je me pose vraiment des questions de photographe, notamment la question du cadre, je ne pense pas à autre chose, c’est vraiment photographique.

Au fond l’idéal pour moi serait de photographier toutes les maisons d’un lotissement quelque part en Suède, toujours la même maison avec juste un petite détail qui change, une voiture ou un jardin différent. Les Suédois m’ont beaucoup aidé dans mon goût pour la sérialité car en effet ils arrivent à border une avenue de vingt fois le même immeuble, ou une rue de trente fois la même maison, c’est ce qu’on peut voir dans les périphéries (que les appareils photos évitent, se concentrant sur le centre historique où là effectivement il y a la petite cour pavée photogénique avec des vieilles façades), vitrine de la ville qui affiche sa différence (une différence un peu surfaite à mon goût).
Il ne faut pas oublier que j’habite dans une ville avec aussi une vitrine, la Promenade des Anglais, avec ses beaux immeubles souriants et sa mer bleue et ses palmiers, mais quand on entre un peu à l’intérieur de la ville, on voit que c’est une ville avec plusieurs centaines de milliers d’habitants, des endroits moins beaux, des endroits très laids, des endroits neutres, ni beau ni laids et c’est là que les gens habitent (aussi l'humain n'est pas si absent de mes images au fond). Je n’aime pas le beau, j’aime le normal, le neutre, le banal, le beau en général m’agresse, m’épuise, ou alors je vais dire que je trouve belles des choses que peut-être les gens ne remarquent pas, comme une entrée d’immeuble ou un parking. En outre je ne sais pas si ce qu’on appelle aujourd’hui beau) beau, c’est plutôt un beau industriel, rationnel, calculé, rentabilisé (notamment par les professionnels du tourisme), j’appelle cela la réalité siliconée. Les pavés, les petites fleurs, le centre historique ou le côté faux italien de la vieille ville de Nice par exemple. J’ai été à Palerme, là pour le coup une ville belle, où de magnifiques palais sont laissés en ruine et mangés par la végétation, le beau quand il ne s’accompagne du vrai peut même un peu m’énerver et me mettre de mauvaise humeur.

Chaque ville ou presque a sa vitrine, c’est ce que j’entendais pas « vieille p… remaquillée » pour Paris, Vienne ou ce que vous voulez, le plus important dans cette espression ce n’est pas la fille de joie non, ou les fille au coin des rues (je crois) comme dans cette belle chanson de Frehel, le plus important c’est le « remaquillée », j’aurais pu dire Pétasse siliconée.

Même Malmö pourtant aride et ‘vrai’ a sa vitrine, son petit centre avec des maisons plus anciennes, toc (car le vrai c’est la rude architecture fonctionnaliste suédoise, c’est là que les gens vivent, les gens normaux), il y a la turning torso de Calavatra, là quelques touristes venus photographier des images, oui car peut-être les touristes ne photographient pas du réel, ils photographient des images déjà faites quelque part, virtuellement, ils cherchent à ce que leur images ressemblent à une image préexistante (ready-made), c’est pareil à la Tour Eiffel non ? quelqu'un parlait de la Corée du Nord, je ne sais plus pourquoi, je ne vais pas vous dire que Paris ou Malmö c’est la Corée du nord (j’ai un certain sens de la mesure), non mais en Corée du Nord, vous photographiez où on vous dit de photographier non ? ben à Malmö et Paris, c’est un peu pareil, je n’ai jamais vu un touriste à la porte de Bagnolet.

Pourquoi ? la peur de la solitude, la peur de la folie peut-être, la peur de produire quelque chose qui ne serait pas reconnaissable (mais pourquoi photographiez-vois la porte de Bagnolet ou les zones industrielles de Malmö ?), la peur en somme, oui, je crois, il faut que les images parlent, qu’on les reconnaisse surtout, ah oui, vous avez photographié cet angle de rue à cause du petit enfant là ou à cause de ce cycliste pressé, faites la même photo sans le gosse ou le cycliste (ce que je fais, un jour j’ai dit « Je vais faire du Cartier- Bresson mais sans le cycliste ni le gosse ni le type qui saute au dessus de la flaque d’eau ») parce que y’en marre des cyclistes, c'est-à-dire y en marre des photos saturées d’informations, que tout le monde comprend, que tout le monde y sait pourquoi que vous l’avez prise votre image, les images doivent laisser perplexe (selon moi bien entendu et au stade où j’en suis de mon cheminement photo)… que les images parlent je disais… mais justement, je les trouve souvent bien muettes finalement (disons qu'elles parlent piour ne rien dire), c’est lié sans doute à leur surproduction.
Je me souviens de ce très beau texte de Barthes sur la photo, La chambre claire, où il parlait (je crois, je n’ai plus ce livre) du studium (ce qu’apprend une photo, ce qu’elle montre, ce en quoi et sur quoi elle informe, ce qui est dicible) et du punctum, ce qui pointe, touche, un je ne sais quoi, là où la signification échappe, j’aime ce portrait parce que derrière, au fond (le photographe ne l’a peut-être pas vu), il y a l’entrée d’une boutique qui me fait penser à mon enfance, ou quelque chose comme ça (je crois que dans son livre, Barthes prend plusieurs exemples, et il y a un portrait, Barthes remarque comme punctum, les ongles longs et sales… -avec une pointe d’érotisme d’ailleurs- du type photographié). Ça, ça reste à la photographie, le problème c’est que ça se retrouve plus dans les images ratées ou du moins chancelantes ou pas trop calculées (Robert Frank a développé toute son esthétique photo là-dessus), et c’est vrai qu’aujourd’hui, le raté, on le tue dans l’œuf, avant on avait une planche contact, on pouvait voir les beaux bébés et les bébés pas beaux, aujourd’hui avec cet avortement des images sur écran (un vrai massacre)…

Oui, j’aimerais que tous les photographes du monde entier m’envoient leurs JPEG qu’ils s’apprêtent à jeter à la corbeille, delete, je ferai la plus grande collection de photos ratées de l’histoire de la photo, comme j’aimerais collectionner tous les livres que les gens n’ont pas jugé bon de publier les trouvant trop ceci ou pas assez cela… (Brautigan dans L’avortement parle de cette bibliothèque où chacun peut amener son livre, la grand-mère comme la petite fille). Pourquoi jetez-vous vos photos, pourquoi ne pas leur donner une chance de vivre, au nom de quoi ?
Au nom des critères imposés par je ne sais qui, une bonne photo c’est ça, ça et ça, et si c’est pas ça, ça et ça c’est poubelle. L’album de famille de monsieur Svensson doit ressembler à celui de monsieur Larsson, comme sa cuisine Ikea et sa berline Volvo. Oui oui je me suis remis à faire de la photo après six ans de diète d’images; en Suède, je sentais que… qu’il y avait là quelque chose, non que la Suède soit photogénique mais elle est photographique.

Maintenant, je reviendrai peut-être à la figure humaine un jour, Robert Frank va m’en donner encore envie et le petit Curly aussi, il fait des images que j’ai en tête comme une boite de sauce tomate tombée sur le sol d’un supermarché peut-être en Allemagne, je m’en souviens de ses images, deux ou trois Curly encore et je saurai pourquoi j’ai acheté un M8, pour utiliser mon M3 sans cellule et photographier de manière intuitive des choses qui dans le monde me posent des questions (comme un flacon de sauce tomate fracassé dans un Spar à Berlin)
http://www.flickr.com/photos/kunstmituns/3309379752/
bardamu
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:wink:
Bertrand T
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Ouille ! Je reprends la lecture du forum après une pause d'une dizaine de jours et il y a du très lourd ! Hello Kitty mène à tout, y compris à des considérations très intéressantes sur l'attitude du photographe ou la sociologie scandinave (les dérives personnelles et débats à tournure politique sont moins intéressants, et menacent même de couler l'ensemble). Merci pour cette longue mais bonne lecture !

citation :
et je ne vous parle pas de Kiruna. regardez juste sur un carte où c'est.

Là c'est dommage… Tu as certainement des choses intéressantes à dire et montrer juste un point sur une carte sans évoquer la plus grande mine de fer d'Europe, à ciel ouvert, en pleine ville :shock: me semble brader à vil prix les charmes de la préfecture de Laponie. :wink:
bardamu
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sans oublier son Ice Hotel pour touristes gogo (j'y suis allé, je sais de quoi je parle)...
invite9

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bardamu
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OoH yes Fred, avec des fumeurs de crack siouplait !
invite9

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Invité
j'ai été pour la dernière fois à Kiruna début avril 2002 (on a poussé jusqu'à Narvik et on a fait pas mal de ski de fond à Abisko et Riksgränsen)
à l'époque je ne faisais plus de photos, mais j'ai acheté tout de même un appareil jetable avec lequel j'ai fait quatre photos peut-être de Kiruna
j'ai adoré, mon intention est d'y retourner en plein hiver mais c'est toujours reporté
je serai curieux de savoir quelle tête a la batterie d'un M8 par moins trente
j'ai vu le Ice hotel en fonte car l'hiver avait été plus chaud que d'habitude, je n'aime pas les trucs à Touristes mais j'ai trouvé ça très beau et pas kitsch du tout, j'ai été agréablement surpris

quant à Hello Kitty, elle me poursuit, en dix jours j'ai dû voir quinze petites Suédoises avec des tee-shirts Kitty (je croyais que ce personnage était déjà ancien mais il semble qu'on soit en pleine vogue)
un jour, alors que j'allais jeter les poubelles, j'ai ouvert le couvercle Poubelles pour le carton (en Suède, les poubelles ont 14 trous, papiers, verre, verre coloré, aliments, etc... faut faire son popo dans le bon trou), j'ai ouvert la poubelle donc et j'ai vu un emballade carton Hello Kitty
arghhh
Geraud
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Vieux briscard
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Harlem c'est plus ce que c'etait depuis que Bill Clinton y a installe son bureau!

New York c'est comme Paris ca perd de sa personnalite. Plus moyen de trouver le moindre dealer meme en allant a Lexington et 125eme, et je ne parle meme pas des changements autour de Times Square.
bardamu
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beveziers a écrit :
Tu craques, comme je suis en train de lire "Ceux de 14" sur tes conseils, commande " coupable de tout" de Herbert Huncke.


OK, ça sera fait. Et je vais bientôt avoir du temps pour lire :cool: :cool: :cool:
Geraud
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Vieux briscard
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Plusieurs points:

Concernant les photos ratees, il y avait un photographe qui avait fait un bouquin la-dessus. En fait il se limitait aux photos de famille ratees (les reunions familiales ou on pose...) Je n'ai pas reussi a retrouver la reference toutefois, mais j'en avais entendu parler a la radio, il y a une bonne dizaine d'annees.

La batterie des M supporte tres bien les temperatures par -30, mais elle dure moins longtemps que normalement. Je n'ai pas eu de blocages cet hiver (a part le blocage de mes doigts quand il y avait un vent de... -50)

Hello Kitty c'est pas nouveau au Japon et en Asie, mais en Europe ca n'est pas connu depuis 30 ans (son venerable age), resultat les midinettes voient ca comme une nouveaute super mode super trop chou kawaii. C'est sans doute un effet du temps aussi, Hello Kitty c'est un peu la prolongation de la phase petite fille a l'adolescence et meme apres. Sans doute le cote sur-protection actuel... sauf quand on se retrouve a bosser/se faire insulter au McDo.
DOMI51
    teinte chaire !!
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REIMS
chaire liberte , pardon chére liberte et oui bravo .
aileka
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Hello Kitty, ce n'est pas si nouveau en France non plus. Ma fille nous cassait les oreilles avec ça il y a déjà près de quinze ans!
@Geraud: Oui NY a bien changé! J'ai un copain qui a un Bronstone dans la 124èm rue. Toutes les maisons sont refaites à neuf, c'est devenu très tendance d'habiter Harlem. Le seul problème, pour un non initié du quartier, c'est de trouver un taxi. Les taxis jaunes ne sillonnent pas Harlem et les taxis sont de simples berlines qu'il faut savoir repérer!
Invité
Merci Paga pour ces précisions et cette recherche documentée (je viens de parcourir l’article wikipedia sur la guerre du Viêt-Nam, ça peut servir aussi à ça Summilux, pas qu’à faire de la sociologie suédoise ah ah), je reste intéressé par cette question du pourquoi le noir pour les appareils pros (en même temps qu’il me semble que ces dernières années, il y a un véritable carnaval de couleurs dans les magasins photos amateurs du moins, peut-être parce qu’il n’y a plus trop de guerre, ou pas de reporters de guerre amateurs…enfin c’est à voir). Non la question que je me pose finalement c’est si ces appareils noirs étaient destinés à des reporters de guerre, pourquoi ne pas les avoir fait en couleur vert militaire, un peu comme Leica a fait avec leurs très beaux modèles Oliv (je n’en ai jamais vu un en vrai mais je les trouve vraiment kawaï) (Leica Oliv qui ont été fabiriqués en temps de paix, pour aucun conflit particulier il me semble)
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