| tilu |
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Membre des Amis Messages : 1534Depuis le 14 nov 2009 Le Crotoy (baie de somme) |
9-9 bis d’Oignies, 11-19 de Lens Puissance industrielle et déclassement Aux origines du bassin minier: Oignies La découverte du charbon à Oignies au milieu du XIXème siècle marque un tournant décisif dans le développement économique de la région. C'est en 1841 que le premier puits de recherche est entrepris, révélant l'exceptionnelle richesse du sous-sol. La Compagnie des mines de Courrières, constituée en 1852, va progressivement développer son exploitation sur ce gisement de qualité. Le territoire d'Oignies se révèle particulièrement prometteur, avec des veines de charbon gras particulièrement adaptées aux usages industriels et domestiques. Cette découverte initiale conduira, près d'un siècle plus tard, à la création du complexe minier le plus moderne de la compagnie. Les compagnies minières privées se développent de Béthune à Charleroi et vont asseoir le développement de la révolution industrielle et en particulier celui de la France sur une exploitation féroce de la classe ouvrière immortalisée dans le chef-d'œuvre de Zola. -------------------------------------------------------------------------------------------------------------- 1/23 ![]() Minolta Autocord A 1955 La plaine industrielle de Lens Liévin vue depuis la cote 145 de Vimy. Au loin la fosse 11-19 Saint Pierre-Destombes avec les terrils 74 et 74A (les plus hauts d'Europe) ainsi que le tabulaire 74B. à suivre... Quand il se promène, le photographe voit le même spectacle que tout le monde. Mais lui, il va s'arrêter pour regarder. E Boubat |
| lepetitpiero |
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Habitué Messages : 481Depuis le 26 août 2008 Drôme |
Comme dit ailleurs: Superbe ! Leica M6 - M10 - M10M - SL2-S // Voigtlander 15mm f/4,5 - Zeiss 25mm f/2,8 - Leica 35mm f/2 - Zeiss 50mm f/1,5 - Leica 90mm f/2,8 |
| tilu |
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Membre des Amis Messages : 1534Depuis le 14 nov 2009 Le Crotoy (baie de somme) |
Merci pour les coeur et pour le retour. Merci spécialement à miette qui m'a donné l'envie de faire ce reportage avec les très belles photos postées ici . ----------------------------- La création des fosses 9 et 9 bis (1930-1946) Dans le contexte de la reconstruction et de la modernisation de l'entre-deux-guerres, la Compagnie des mines de Courrières entreprend le fonçage du puits n°9 le 16 février 1930, suivi du puits n°9 bis le premier août 1930. Ce double puits De Clercq Crombez, situé stratégiquement sur le riche gisement d'Oignies, représente un investissement majeur pour la compagnie. La fosse entre en service en 1933 avec des installations techniques parmi les plus avancées du bassin, symbolisant la volonté d'optimiser l'extraction grâce à des méthodes industrielles modernes. Rôle de puits de concentration À partir des années 1960, le 9-9 bis est transformé en siège de concentration, centralisant l'extraction de plusieurs fosses environnantes de la Compagnie de Courrières. Cette rationalisation permet de regrouper le traitement du charbon et d'optimiser les coûts de production dans un contexte de plus en plus concurrentiel. Le même procédé de concentration est aussi mis en œuvre dans le groupe de Lens avec un effet encore plus massif qui verra le fonçage du puits 19 à côté du puits 11 et la construction d'un chevalement d'un nouveau type en béton. Données techniques détaillées et rôle industriel des fosses 9-9 bis du groupe de OIGNIES Architecture et profondeurs Puits n°9 : 828 mètres de profondeur Puits n°9 bis : 578 mètres de profondeur Deux chevalements métalliques identiques, caractéristiques des constructions minières modernes de l'époque Système d'accrochages détaillé : Le puits n°9 disposait de 8 niveaux d'accrochages (centralisation des abattages et remontée du charbon) répartis entre 185 et 809 mètres : 185 mètres (niveau d'exploitation initial); 260 mètres; 335 mètres; 410 mètres ; 485 mètres ; 560 mètres ; 659 mètres (niveau profond intermédiaire) ; 809 mètres (niveau le plus profond, proche du fond du puits) Le puits n°9 bis comptait 6 niveaux d'accrochages entre 185 mètres et 560 mètres, organisés en coordination avec le puits principal pour optimiser l'aérage et la circulation du personnel. Données techniques détaillées et rôle industriel des fosses 9-9 bis du groupe de LENS Architecture et profondeurs : Puits n°11 : 852 mètres de profondeur. Fonçage en 1891, mise en service en 1894, fermeture en 1986. Un chevalement métallique de 45m, 350T, moteur de 1200CV permettant d’extraire 800 T/ heure. Puits n°19: 815m. Fonçage en 1954, entrée en service en 1960, fermeture en 1986.66m en béton, 10 000T de béton, deux machines de 4000CV. Les terrils jumeaux (n° 74, 74A) et le terril tabulaire 74B), atteignant 187,5 mètres d'altitude, figurent parmi les plus hauts d'Europe. Ils s'ajoutent à deux plus anciens terrils coniques (79 et 79A) en partie disparus et exploités pour leurs schistes {Production et effectifs du 9-9 bis de Oignies : Production maximale : 1 200 tonnes par jour, représentant environ 350 000 à 400 000 tonnes annuelles. Effectifs : jusqu'à 2 000 ouvriers répartis entre le fond et la surface durant la période d'activité maximale. Production et effectifs du 11-19 de Lens: Production maximale : 8000 tonnes par jour, pour 6000 prévues. Effectifs : jusqu'à 5 000 ouvriers répartis entre le fond et la surface durant la période d'activité maximale. ------------------------------------------- 2/23 ![]() Puits 9 et 9bis de Oignies 3/23 ![]() 100T de cable pour les ascenseurs. Fabriquées dans les cableries de Lens (devenues Nexans pui fermées). 4/23 ![]() Puits 9bis et circuit d'air comprimé pour faire fonctionner les machines du fond. Leitz Quand il se promène, le photographe voit le même spectacle que tout le monde. Mais lui, il va s'arrêter pour regarder. E Boubat |
"+1" de la part de : Alternatif, amansjeanphilippe, Fabrice_B, lepetitpiero, miette, Ninjasan, Paradoxal |
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| tilu |
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Membre des Amis Messages : 1534Depuis le 14 nov 2009 Le Crotoy (baie de somme) |
Merci pour vos retours. Un complément sur le chevalement. Celui-ci est un mixte entre chevalement béton et avant-carré porteur en poutrelles métalliques. Le sommet de l’avant carré porte les molettes. Ces poulies très robustes supportent l’ensemble de la charge qu’elle supporte ainsi que la traction de la machine. Les bigues sont orientées vers la machine d’extraction afin de compenser la traction du câble. La machine est située dans une salle différente. Elle fonctionne au courant continue ce qui permet de développer un couple important. Cela nécessite des redresseurs de courant monumentaux. Un astucieux treuil biconique permet de compenser la différence de couple entre câble enroulé et deroulé. Sa construction est un délicat travail de fonderie. De même que la conception des guides câble. Le câble était inspecté quotidiennement et régulièrement changé. Quand il se promène, le photographe voit le même spectacle que tout le monde. Mais lui, il va s'arrêter pour regarder. E Boubat |
| tilu |
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Membre des Amis Messages : 1534Depuis le 14 nov 2009 Le Crotoy (baie de somme) |
La nationalisation et l'apogée (1946-1970) Alors que l'occupation nazie est, dans la lignée de celle de la première guerre mondiale particulièrement terrible, les mineurs des houillères sous la direction de la CGT clandestine, du Parti communiste français interdit et de ses organisations de résistance Front National et Francs Tireurs et Partisans se mettent en grève avec des revendications salariales et patriotiques. Immédiatement, la bourgeoisie engagée à fond dans la collaboration, par ses directeurs des mines, ses ingénieurs et ses porions, dénonce les syndicalistes. La police et les juges français arrêtent 700 mineurs, tandis que des centaines d’autres sont obligés d’entrer dans la clandestinité. 270 mineurs sont déportés dans les camps de concentration. 130 sont fusillés à la citadelle d’Arras, parmi eux 90 militants du PCF. Le résistant communiste Julien Hapiot, héros de la grève patriotique des cent mille mineurs du Nord–Pas-de-Calais en mai-juin 1941, y est par exemple fusillé en septembre 1943. On se souvient en particulier de la figure de Vasyl Porik, prisonnier de guerre soviétique et l'un des meneurs de la lutte fusillé en 1944. Cette mobilisation se traduit dans le programme du Conseil National de la Résistance. À la libération, Maurice Thorez entre au gouvernement et crée le statut de la Fonction Publique et Auguste Lecoeur celui des mineurs. Marcel Paul nationalise l'énergie. Les compagnies privées sont regroupées dans les Houillères du Nord Pas de Calais. La loi de nationalisation de 1946 intègre la fosse au groupe d'Oignies des Houillères du Bassin du Nord-Pas-de-Calais (HBNPC). Cette nouvelle ère s'accompagne d'importants investissements pour moderniser les installations et améliorer les conditions de travail. Le site atteint son apogée technique et productif dans les années 1950-1960, devenant un élément clé de la reconstruction économique française et de la production énergétique nationale. Dès 1948, une grève très dure est menée contre la trahison des engagements pris auprès des mineurs. Le pays conscient que c'est leur travail harassant qui a permis la reconstruction se mobilise et des enfants de grévistes sont accueillis dans la France entière. Dans le climat délétère de la guerre froide et de la chasse aux sorcières, le socialiste Jules Moch (que les mineurs appelleront Jules Moche) envoie les CRS et les blindés de l'armée prendre d'assaut les carreaux de fosses. La répression est terrible. Les allocations familiales des grèvistes sont par exemple suspendues. Cet épisode honteux et antidémocratique, absolument ignoré des programmes scolaire risque tout simplement d'être effacé des mémoires quand les images des tanks à Prague ou sur la Place Tien An Men sont imprimées dans la mémoire collective de l'Ouest. Il faut ici clairement évoquer la notion de censure. La nationalisation permet une modernisation constante avec l'arrivée des machines à air comprimé puis électriques sur les chantiers d'abattage, et une amélioration des conditions de travail et de la sécurité, même si le travail de fond restent d'une pénibilité extrême. De plus comme le montre la répression de 1948 et les catastrophes minières, comme celle de Liévin, nationalisation ne veut pas dire fin de l'exploitation des travailleurs. Bien au contraire, le gouvernement socialiste qui a brisé la grève en 1948 en s'appuyant sur l'armée et sur une hiérarchie minière ainsi qu'une justice qui n'avaient pas été épurée à la Libération (en dépit d'une collaboration avérée à l'effort de guerre nazi) a permis le retour de l'exploitation la plus rude. 5/23 ![]() 9 de Oignies. La recette: les berlines chargées de charbon remontent à la surface. 6/23 ![]() 9 de Oignies. Machine d'extraction. Le cable entre par une meurtrière. Il s'enroule sur un tambour biconique astucieusement conçu. 6/23 ![]() 9 de Oignies. Tableau de commande dans la guérite du conducteur de l'ascenseur. On distingue l'indicateur moderne de position des câges ainsi que la boite noire qui enregistre les mouvements. Le conducteur est seul dans un hall immense. Quand il se promène, le photographe voit le même spectacle que tout le monde. Mais lui, il va s'arrêter pour regarder. E Boubat |
| A$AP |
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Régulier Messages : 260Depuis le 14 avr 2025 Austrasie |
Bonjour Tilu C'est du bon boulot, vous devriez aller au charbon plus souvent ! Plus sérieusement, j’aime beaucoup. C’est magnifique photographiquement, avec une gamme de gris vraiment riche et parfaitement maîtrisée. Cette approche reportage, avec une présentation en séquence, offre un vrai confort de lecture, contrairement à la profusion d’images que l’on trouve sur certains fils. Même pour le béotien que je suis dans ce domaine, c’est un vrai plaisir à découvrir. Vous parvenez à raconter une histoire avec justesse, c’est ce qui donne à l’ensemble toute sa force. Donc, merci et au plaisir de découvrir la suite. As simple as photography |
| GUIRAUD |
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Membre des Amis Messages : 1764Depuis le 24 oct 2017 01700 |
C'est un très beau travail d'écriture et d'édition, qui rend hommage à une population qui a bien souffert. la mort est une maladie qui s'attrape à la naissance Frédéric Dard |
| tilu |
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Membre des Amis Messages : 1534Depuis le 14 nov 2009 Le Crotoy (baie de somme) |
Merci à vous. Vos encouragements me touchent. La fermeture et la reconversion Le 21 décembre 1990, la dernière gaillette de charbon du bassin Nord-Pas-de-Calais est solennellement remontée au 9-9 bis, marquant la fin de trois siècles d'exploitation minière française. Le plus gros centre d'exploitation le 11-19 de Lens a fermé en 1986 et fut comblé dès 1987. Alors que les édiles locaux veulent à tout prix faire du passé table rase (sic) au plus vite en détruisant les sites miniers pour effacer leur mémoire, le site est sauvé de la démolition par l'action déterminante de l'association ACCUSTO SECI (Association pour la Conservation et la Custode du Site et des Equipements Industriels), présidée par Jean-Marie Minot. Cette association apolitique, composée en grande partie d'anciens mineurs, entreprend la restauration complète de la machine d'extraction de 1 200 tonnes, chef-d'œuvre technologique aujourd'hui classé Monument Historique. Il faut rendre hommage à ces bénévoles dont le travail a préservé la mémoire et la fierté d'une corporation ouvrière toute entière. Cette mémoire ouvrière des gueules noires et des cols bleus, dont le patronat local s'est toujours défié quand bien même il leur doit sa richesse et celle du pays tout entier est pourtant bien méprisée. Ainsi, les projets de reconversion de sites miniers, entrepris sous la pression populaire lui tournent le dos et préfèrent créer des lieux dits "culturels". Exemple emblématique, le Louvre Lens, massivement financé sur fonds locaux pourtant, fait le choix architectural délibéré de nier toute référence aux puits 9 et 9 bis (de Lens) sur lesquels il est construit. L'opposition, il est vraie en partie inconsciente, de classe entre production industrielle et culture interpelle tant elle rappelle l'antagonisme de classe qui a marqué la région dans sa géographie et dans ses paysages. 7/23 ![]() 9 de Oignies. Machine d'extraction en fonctionnement et cadrans de contrôle. 8/23 ![]() 9 de Oignies. Machine d'extraction en fonctionnement et indicateurs mécaniques de position des cages. 8/23 ![]() 9 de Oignies. le téléphone du conducteur de l'ascenceur. Quand il se promène, le photographe voit le même spectacle que tout le monde. Mais lui, il va s'arrêter pour regarder. E Boubat |
"+1" de la part de : amansjeanphilippe |
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