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Du macaron rouge au macaron noir.

MessagePosté: samedi 25 octobre 2008 - 12:50
par philokalos
Première partie.

Pourquoi ce passage du macaron rouge :leica: du M8 au noir du M8-2 ? C'est en lisant l'oeuvre de Jean Clair "Duchamp et la photographie" que j'ai eu une réponse.

Avec le macaron rouge :leica: Leica donnait de l'importance à la garance, sorte d'irisation qui entoure le nom "Leica" d'un nimbe qui sanctifie -au sens de consacrer- la marque inventrice du 24x36. C'est l'aréole que tous nous voudrions approcher pour téter: Leica, mère nourricière du petit format. C'est l'aura qui satisfait le besoin pour l'instant miraculeux, celui que souhaite saisir tout photographe assoifé de "faire de l'apparence une apparition".

Rien à voir avec la "kleptomanie scophotophilique du touriste" armé d'un photoscope pour ne produire que du colportage. Le leicaïste, soucieux d'atteindre le "métaréalisme invisible à l'oeil normal", devient une Célestine entre la lumière solaire et le capteur lunaire au moment où il déclenche: "c'est l'instant où la durée se fait forme, l'instant où le temps se fige en espace" virtuel, en attendant l'impression jet d'encre; l'instant, en somme, qui effleure l'érternité.

MessagePosté: samedi 25 octobre 2008 - 12:52
par PhD69
Vivement la seconde ou deuxième partie...
Cordialement.
Philippe

MessagePosté: samedi 25 octobre 2008 - 12:59
par Phil VDD
PhD69 a écrit :
Vivement la seconde ou deuxième partie...
Cordialement.
Philippe


:lol:

Oui!

Encore! Encore! Encore... !

MessagePosté: samedi 25 octobre 2008 - 13:12
par philokalos
Deuxième partie.

Subitement le macaron rouge :leica: devient noir ! Alors c'est "la passion de la litote" qui l'emporte, le goût pour le classicisme. Pas besoin de macaron rouge :leica: : c'est le boîtier même qui est auréolé par ses formes intemporelles reconnaissables entre toutes. Tout habillé en noir, il s'efface pour ne laisser voir que l'artiste qui l'utilise avec perspicacité.

Mais le fait de posséder un M, nous le savons bien, ne fait pas de nous des photographes émérites qui transformeraient tous leurs déclenchements en ready-mades, c.-à-d., en "instantanées promues à la dignité d'instantanées artistiques par le simple choix de l'artiste" (comme disait fort convaincu un photographe conceptuel espagnol:"Je suis un artiste, donc tout ce que je produis c'est de l'art").

Reste leur vertu essentielle, qui fait leur fascination: les clichés "ne sont pas faits; ils sont choisis, tout faits". Ils sélectionnent ce qui est à la vue de tous et "substituent le travail par la trouvaille". Au Moyen-Âge, les troubadours; à notre époque, les "trouvailleurs", poètes de l'image.

Le macaron noir annonce la fin du bling-bling, le retour au seul talent du photographe. Serait-il celui qui oublie son matériel et qui, tel un enfant émerveillé, attend éveillé les images-cadeaux que la providence voudrait bien lui octroyer?

MessagePosté: samedi 25 octobre 2008 - 13:32
par PhD69
Peut-être moins "spatial" que la première partie.
Une troisième ? :?:

MessagePosté: samedi 25 octobre 2008 - 13:38
par philokalos
Troisième et dernière partie.

Mes chers amis, l'austère, cistercien habillage du M8-2 permet de ne se concentrer que sur l'essentiel: le boîtier disparaît au profit du regard. Marcel Duchamp assurait que "c'est le regardeur qui fait le tableau", ce que nous avons trop tendance à oublier lorsqu'on considère la photographie comme une copie fidèle de la réalité.

"Quelques personnes "voient" presque instantanément; il faut à la plupart un entraînement", claironne Clair. Eh bien, l'ascétique Leica M ( en grec, askêsis signifie "entraînement") est l'outil quasi-parfait pour arriver à voir... si on persévère, car selon "les principes d'une jouissance retardée, on doit prendre un peu de patience pour JOUIR vraiment" :wink: .

Jacques Lacan disait (p.86): "C'est par le regard que j'entre dans la lumière, et c'est du regard que j'en reçois l'effet. D'où il ressort que LE REGARD EST L'INSTRUMENT PAR OÙ LA LUMIÈRE S'INCARNE, et par où -si vous me permettez de me servir d'un mot comme je le fais souvent, en le décomposant- je suis photo-graphié".

À chaque fois que nous déclenchons, c'est Dieu qui nous prend en instantanée :content: ...

Merci, PhD69 et PhilVDD, pour vos encouragements. J'avais commencé ce fil par une question futile: "Pourquoi ce passage du macaron rouge :leica: au noir ?", et nous voilà arrivés aux pieds de la haute montagne que je n'oserais pas gravir sans me déchausser. Est-ce-que j'ai répondu à vos attentes ? Est-ce-que je vous ai déçus ? Pourquoi ce macaron noir, pourquoi ? Laissons à Jean-Luc Jehan répondre:

"Noircir, c'est faire apparaître, rendre visible un dedans en un représenté" (idée magnifiquement traitée par Merleau-Ponty dans "Le visible et l'invisible").

Quand à moi, je pense tout simplement que Leica en avait marre qu'on cache son logo avec du gaffer noir :lol: !

MessagePosté: vendredi 31 octobre 2008 - 15:12
par S.H.
philokalos a écrit :
Quand à moi, je pense tout simplement que Leica en avait marre qu'on cache son logo avec du gaffer noir :lol: !

J'adore la chute :wink: . Joli pastiche.

MessagePosté: vendredi 31 octobre 2008 - 16:26
par danyves
Au final le macaron noir et la laque brillante sont au moins aussi bling bling. Aux USA, certains passent du M8 au M8.2 juste pour le look.

Certains ont beucoup trop d'argent :wink:

MessagePosté: vendredi 31 octobre 2008 - 16:30
par TheMaxou
Je fais remonter ce post très intéressant de Marielle pour customiser sa pastille :D

MessagePosté: vendredi 31 octobre 2008 - 19:35
par Floflo
Oui, la chute est digne d'un "Adieu poulet" où Lino Ventura clamait avec son mégaphone "Verjeat, il est à Montpellier Verjeat !". Elle est séduisante cette pastille noire... :D

MessagePosté: samedi 1 novembre 2008 - 23:36
par philokalos
Merci de vos commentaires :D , qui m'ont donné autant de plaisir que d'écrire ce fil sur les macarons. Je dois partir en Espagne lundi pour finir le master photo et, donc, c'était comme des adieux avant de nous retrouver dans 9 mois. Bonnes photos à tous !
Amicalement,
Roberto.

MessagePosté: samedi 1 novembre 2008 - 23:44
par invite2

Message supprimé à la demande de son auteur.

MessagePosté: samedi 1 novembre 2008 - 23:46
par Geraud
Bon courage Roberto!

Mais... il n'y a pas internet en Espagne? :wink:

MessagePosté: samedi 1 novembre 2008 - 23:57
par philokalos
Bien sûr que oui ! Partout, sauf à l'appartement que j'ai loué en plein parc naturel de La Albufera. Je pourrai me connecter de temps en temps, mais pas tous les jours, ce qui est gênant si je dois répondre rapidement à un intervenant.
PRIMERO EL DEBER ; DESPUES, EL PLACER. Et ça sera toujours un plaisir de vous retrouver... après avoir fait les devoirs .
:vivesummilux: